San Francisco, le vendredi 18 août 2023
– La plate-forme de vidéo en ligne a annoncé vouloir renforcer sa
politique de lutte contre la désinformation médicale, tout en
préservant la liberté d'expression des internautes.
Promotion d'un traitement par
l'hydroxycholoroquine, contestation de l'efficacité et de la
sécurité des vaccins, minimisation de l'ampleur de la
pandémie… : la crise sanitaire liée à la Covid-19 a constitué
un terreau fertile pour les fake-news dans le domaine
scientifique et pour la désinformation médicale. Nombreux sont ceux
qui, naïvement ou par intention malveillante, ont diffusé de
fausses informations dans le domaine de la santé, mettant
possiblement en danger de nombreuses personnes.
Les réseaux sociaux, par leur facilité
d'utilisation et l'ampleur de leur audience, ont bien sur un rôle
prépondérant dans la diffusion de ces fausses informations
médicales. A plusieurs reprises, les scientifiques ont exigé que
ces réseaux sociaux et notamment Youtube, la plus grande
plate-forme de vidéo en ligne, agissent contre la désinformation
médicale. En janvier 2022, plus de 80 organes de presses et
organisations spécialisés dans le
« fact-checking » et la lutte contre les
« fake med » (les médecines alternatives)
avaient ainsi adressé une lettre ouverte à Youtube pour lui
demander de lutter contre « la désinformation
galopante », constatant que la plate-forme était
« l'un des principaux vecteurs de désinformation en ligne
dans le monde » et « ne faisait pas beaucoup
d'effort pour mettre en œuvre des politiques qui résolvent le
problème ».
Plus de promotion de traitements alternatifs contre le
cancer sur Youtube
Près de 18 mois après cette
lettre ouverte, Youtube répond enfin à ces critiques. Dans un
communiqué publié ce mercredi, la filiale de Google annonce
renforcer sa politique de lutte contre la désinformation médicale.
La plateforme a ainsi annoncé qu'elle supprimerait toutes les
vidéos qui « contredisent les recommandations des
autorités officielles sur la prévention et la transmission des
maladies, l'efficacité des vaccins, les traitements efficaces ou
qui dénie certaines informations médicales », Youtube
prenant ici l'exemple des vidéos dans lesquels certains internautes
minimisent le nombre de morts de la Covid-19.
Si c'est en premier lieu les vidéos
complotistes et de désinformation sur la Covid-19 qui sont visées
ici, Youtube cible l'ensemble de la désinformation médicale et
notamment les vidéos défendant des traitements alternatifs contre
le cancer. « Nous devons nous assurer que les victimes de
cancer qui se rendent sur Youtube y trouveront des informations
conformes aux données de la science, nous allons donc retirer tous
les contenus qui promeuvent des traitements qui sont inefficaces ou
dangereux ou qui incitent les patients à ne pas consulter un vrai
médecin » explique la plateforme. « Par exemple,
une vidéo qui expliquerait que l'ail soigne le cancer ou que la
vitamine C est plus efficace que la radiothérapie sera
supprimée ». On pense ici aux nombreuses vidéos parfois
très populaires de naturopathes, dans lesquels de soi-disant
experts incitent leurs adeptes à se détourner de la médecine
traditionnelle en cas de cancer.
Youtube contre Twitter
La lutte contre la désinformation
médicale est cependant un sujet complexe, en ce que la louable
défense de la vérité scientifique ne doit pas venir altérer la
vigueur du débat scientifique et contrevenir à la liberté
d'expression. Youtube précise donc que certaines vidéos qui
contreviennent à ces nouvelles recommandations pourront rester en
ligne si elles présentent « un intérêt
public ». La plate-forme prend notamment l'exemple
d'éventuelles propos d'un homme politique contredisant les données
actuelles de la science, visant ainsi sans les nommer certains
politiciens républicains américains, qui ont pu, pendant la
pandémie, remettre en cause l'utilité des vaccins ou des
masques.
La décision de Youtube de renforcer sa
politique de lutte contre la désinformation médicale prend le
contre-pied de la politique menée actuellement par le fantasque
milliardaire Elon Musk, propriétaire du réseau social Twitter
(qu'il a récemment renommé X). Partisan d'une liberté d'expression
absolue, le patron de Tesla a en effet supprimé toute censure des
fausses informations médicales sur son réseau. Si les fausses
informations médicales ne sont donc plus admises sur Youtube, elles
continuent de fleurir sur Twitter.
Quentin Haroche
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